lundi 7 mai 2012

Bière le Plan B : La première bière artisanale bio clermontoise

Aujourd’hui Vin de Presse ne parlera pas de vin mais de bière et pas n’importe laquelle, une bière locale, artisanale, urbaine (oui, oui !) et bio. Il n’y pas si longtemps, je vous disais que je ne pensais pas sombrer dans les gauloiseries en buvant de la bière mais que je resterai dans une passion unique : le vin. C’était avant de rencontrer Anne-Lise Amiot et sa brasserie le Plan B. Anne-Lise et son compagnon Jean-Baptiste sont de vrais passionnés de la mousse au point de créer leur propre micro-brasserie en plein cœur de Clermont-Ferrand. Ils m’ont fait découvrir à quel point la fabrication de la bière est passionnante et riche d’expérimentations.




J’ai été sensible à leur approche qui consiste à travailler le brassage afin de rester au plus près des arômes du grain. Ils ne souhaitent pas privilégier l’aromatisation car selon eux, elle déséquilibre la bière en masquant les arômes du houblon. Ce ne sera pas une bière pour tout le monde, même si elle reste accessible mais une bière d’amateur. Un autre aspect de leur démarche mérite d’être souligné, ils souhaitent renouer avec la tradition de la brasserie urbaine. Une brasserie, au départ, ce n’est pas celle qui vous propose un « croque monsieur » et des salades mais un endroit de production au sein duquel on brasse de la bière. 

Brasserie parisienne à côté de la Bourse
J’ai ainsi décidé d’entamer mon apprentissage en bièrologie avec le Plan B afin de combler mon ignorance en la matière. Quelques dégustations croisées de vin et de bière sont dores et déjà programmées. Voici donc une présentation de la brasserie le Plan B, de ses fondateurs Anne-Lise et Jean-Baptiste et une vidéo explicative sur le processus de fabrication de la bière.

Leur passion pour la bière ne date pas d’hier, cela fait 10 ans qu’ils cherchent à approfondir leurs connaissances en visitant des brasseries et dégustant des bières de diverses provenances. La rencontre avec un petit producteur sur un marché leur a permise de découvrir l’existence de kits[1] de bière pour amateur et ainsi la possibilité de brasser chez soi, en petite quantité. Étant des consommateurs de bio, leur production ne pouvait que s’inscrire dans cette démarche. Cette passion les a amenée tout naturellement à l’envie de créer une micro-brasserie. 

Kit de brassage
Leur premier projet, il y a 4 ans était de maîtriser toute la chaîne de fabrication, de la production de céréales à la mise en bouteille. Malgré leur envie, ce type de structure leur est paru très difficile à gérer. Il fallait être capable de conjuguer les compétences d’un agriculteur et d’un brasseur mais aussi supporter le coût et les aléas d’une exploitation agricole et d’une brasserie.

En 2011, Anne-Lise est partie faire une formation à l’université de biotechnologie de La Rochelle afin de mieux appréhender scientifiquement tout le processus de fabrication de la bière et ainsi, mieux maîtriser les risques de contamination (grande angoisse chez les brasseurs) et se familiariser avec le matériel professionnel. Jean-Baptiste fera lui aussi cette formation en 2013 afin d’avoir le même bagage scientifique que sa compagne car ils élaborent les recettes et brassent ensembles. De plus, ce sera lui, par la suite, qui prendra en charge majoritairement la production alors qu’Anne-Lise s’occupera de la commercialisation.

Cônes de Houblon frais
Leur décision de s’installer à Clermont-Ferrand peut paraître surprenante car la plupart des brasseries artisanales sont nichées dans les campagnes. En fait, elle s’inscrit complètement dans la volonté d’avoir un lien direct avec le consommateur final et de renouer avec le passé brassicole de la région[2]. Ils souhaitent également privilégier la vente de leur production dans les caves à bière ou chez les cavistes qui connaissent le produit et sont ainsi capables de parler et de valoriser leur bière.

Et les bières du Plan B, c’est toute une démarche qu’il faut savoir expliquer. Anne-Lise et Jean-Baptiste ont eu le temps d’expérimenter des recettes et de découvrir les bières qu’ils souhaitent produire. Lors de leurs dégustations, ils ont remarqué que bon nombre de bières françaises étaient aromatisées ou épicées[3]. A cela rien d’étonnant, ce sont des bières qui sont plaisantes, faciles à boire, accessibles au plus grand nombre mais dont on peut se lasser très vite et qui plus est, manquent parfois d’équilibre. Les saveurs des épices ou de l’aromatisation dominent et écrasent trop souvent celles des céréales et du houblon. 

Grains d'orge maltés
Ce qui les intéresse c’est l’équilibrage entre levures, céréales et houblon. « Le travail avec les levures, les céréales et le houblon est déjà assez riche en arômes et nous permet de travailler notre gamme aromatique naturellement. On veut faire des bières qui ont des arômes les plus proches des céréales et du houblon sans épices et sans aromatisation, des bières naturelles. » Ils ne comptent pas faire de la bière pour amener ceux qui n’aiment pas la bière à en consommer mais des bières pour ceux qui sont déjà amateurs.

Ils vont produire une bière blanche, une blonde, une ambrée, une brune et quelques bières de saison. Selon Anne-Lise, une bière doit titrer entre 4,5° et 6,5°, comporter peu de sucre, avoir un équilibre entre le sucre, l’alcool, l’amertume et les arômes. L’amer doit être présent mais ne doit pas dominer, il faut un équilibre. « Personne n’aime naturellement l’amertume alors que celle-ci peut révéler autre chose comme les arômes. L’amertume, on apprend à l’apprécier par la dégustation. ». Ainsi, le houblonnage peut être plus aromatique qu’amer. Au début de la phase d’ébullition, lors de la fabrication de la bière, il s’agit d’un houblon amérisant alors que pendant la fin de l’ébullition, c’est le houblon aromatique qui se développe. 


Le temps et le contenant qui a servi à la ‘garde’ ou ‘affinage’[4] de la bière ont aussi leur importance. Selon le type de matériau qui compose le contenant, il peut y avoir de nouvelles substances aromatiques qui se développent et ainsi produire des bières très différentes. L’inox, matériau inerte n’apporte pas grand-chose comme apport d’éléments extérieurs, la bière s’affine ainsi sur elle-même. Les contenants en plastique ayant servi à la fabrication de cognac transmettent eux des arômes spécifiques de cognac. Cette pratique permet d’ailleurs d’avoir des bières bien meilleures que celles auxquelles on a additionné du cognac directement. Les fûts de chêne qui ont servi à la vinification apportent eux des arômes de vin et aussi celui du bois. 


Contrairement au vin, le vieillissement (nous dirions plus exactement élevage pour le vin) de la bière est une pratique peu courante mais qui peut se révéler très intéressante à expérimenter. Il permet d’affiner le goût et de développer des arômes spécifiques au vieillissement. La dégustation, il y a quelques années de bières brunes vieillies de très bonne qualité et l’attrait pour les arômes de torréfaction présents dans une bière brune riche en malts torréfiés, ont poussé Anne-Lise et Jean-Baptiste a orienter leurs recherches dans ce sens en faisant vieillir une bière brune dans un fût de chêne ayant servi à faire du vin. Ils vont également tester le vieillissement en cuve.


Le partage est aussi un élément moteur de leur vision du monde brassicole. Après avoir travaillé sur l’expérimentation de différentes levures, ils ont organisé une rencontre avec les anciens élèves de La Rochelle de la promotion d’Anne-Lise. Ils souhaitaient partager le fruit de leur travail afin que toute la promotion puisse tirer profit de leurs recherches et aussi savoir un peu où chacun en était dans sa production. Ils ont proposé 19 bières dont chacune avait été élaborée à partir d’une levure différente et chaque ancien élève avait apporté avec lui, un peu de sa production personnelle. D’après Anne-Lise, cela a été une dégustation de bière très enrichissante par la diversité des produits présentés et la qualité des échanges entre brasseurs. Cela reste son meilleur souvenir de dégustation. 


Je me suis rendue au mois de mars dans les locaux de la brasserie Plan B afin de filmer Anne-Lise expliquant les différentes phases qui interviennent dans le processus de fabrication de la bière. A l'époque les travaux n'étaient pas encore achevés, c'est maintenant chose faite. L’inauguration de la brasserie aura lieu le samedi 23 juin 2012.


Adresse : 32 avenue de la Libération, 63000 Clermont-Ferrand
Mail : contact@bieres-leplanb.com


[1] brassageamateurs.com, un forum de brasseurs amateurs, brouwlnd.com, site belge fournisseur de matériel de brassage en petit volume et de kits de brassage.
[2] Au 19ème siècle il y avait un grand nombre de brasseries en France au sein des villes. En Auvergne, il y a un riche passé relié à la bière. Il y avait des brasseries à Issoire, Ambert, Brioude, … Pasteur qui travaillait sur la conservation de la bière a mené des travaux sur le rôle des levures à Chamalières.
[3] Les bières sont aromatisées ou épicées avec par exemple, de la coriandre, du gingembre, de la réglisse, de la cardamome ou du citron
[4] La garde et l’affinage sont dans les dernières phases de la fabrication de la bière, Anne-Lise vous expliquera et vous montrera tout le processus de brassage dans la vidéo.

3 commentaires:

  1. passionnant, comme toujours!!!! Va falloir qu'on refourgue nos petites pour aller goûter tous ces crus!

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  2. Le premier brassin de blonde a eu lieu hier! Il faudra attendre quelques semaines avant de pouvoir y goûter.

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